Encore tant à découvrir ...
Encore tant à découvrir...
Les quelques siècles que recouvre l'Antiquité ont tracé les linéaments du Vaucluse contemporain. Ces quatre décennies d'exploration du Service d'archéologie du Département de Vaucluse ont fait avancer à grands pas la connaissance de cette ère qui a vu le territoire sortir de la période gauloise, développer son agriculture, aménager ses cités et ses voies de communication. Mais il reste tant encore à découvrir.
" Nous intervenons lorsqu'il y a des menaces de destruction, précise Émilie Fencke, la cheffe du Service d'archéologie, ce sont les projets d'aménagement contemporains qui nous livrent les terrains où l'on peut faire des découvertes, on a rarement le luxe de choisir ". Ce qui explique pourquoi Carpentras, où peu de grands travaux ont été menés dans le centre ancien, demeure la ville dont l'histoire est la plus mystérieuse. De même, l'organisation du monde rural reste à explorer. " On connaît quelques grands domaines mais on ne sait pas grand-chose des petites exploitations, ni leurs formes ni leur maillage, ni leur organisation, reconnaît Émilie Fencke. Cela tient en partie au fait que la vigne, depuis cette époque, prend une place prépondérante, or c'est une culture qui se développe sur le temps long et évolue peu. Les occasions d'aller fouiller sont rares. Ce sont des creux qui nous laissent un gros potentiel d'étude. "Encore tant à découvrir... Les techniques, heureusement, progressent. Pour mener leurs travaux, les archéologues du Département ont désormais recours au scanner 3D qui modélise en un temps record les volumes complexes et reconstitue les ensembles avec une précision inégalée (cf. p.113-115).Mais l'allié numérique ne supplantera jamais l'œil et la main de l'archéologue, équipé de son crayon et de sa truelle. Pour faire parler ce passé gisant sous nos pieds, on ne se passera pas de gratter. " L'archéologie, c'est une affaire entre la terre et soi. Racler le sol pendant des jours, même pour ne trouver qu'un simple débris de poterie, c'est une intense méditation, résumait Romaine Iscariot (décédée en 2021), la fouilleuse bénévole. Il y a quelque-chose de profondément bouleversant à toucher des objets que d'autres hommes, passés là il y a des milliers d'années, ont tenu entre leurs mains. C'est un rapport profond à l'humanité ". C'est aussi le lien avec la terre reçue en héritage que l'avènement de l'archéologie départementale a permis de renouer en menant ce travail de fouille, patient et minutieux, année après année. Désormais, écrire cette histoire n'appartient plus seulement à des spécialistes lointains. " C'est une autre forme qu'a prise la décentralisation culturelle, conclut Émilie Fencke, à l'image de ce que nous réalisons ici en Vaucluse ; désormais, ce sont les territoires eux-mêmes qui prennent en main la compréhension de leur propre évolution."