Robion Sacrés sarcophages !
Robion Sacrés sarcophages !
Deux tombes retrouvées aux alentours de Robion, à quelques mètres du passage de l'emblématique voie domitienne, ont particulièrement attiré l'attention des archéologues du Département. Oubliés là, depuis près de deux millénaires, ces inestimables vestiges ont, en2012, été remontés à la surface à l'occasion de travaux routiers. Si la première date de la fin du IIe siècle, la seconde appartient à la première moitié du IIe siècle, durant le règne de l'empereur Trajan. Mais quoi qu'il en soit, ces deux sarcophages en pierre sont remarquables à plus d'un titre. Les deux sépultures de Robion ont été retrouvées dans une vaste zone de nécropole certes moins importante que celle de Fourches-Vieilles mais au beau milieu de ce qui, à l'époque, était la pleine campagne. Patrick De Michèle, archéologue au Service d'archéologie du Département de Vaucluse et responsable de l'opération ,pense " que la première sépulture composée d'un petit coffre en calcaire recelant les cendres de plusieurs défunts pourrait appartenir à une riche exploitation locale de type villa. Mais nous n'en avons aucune preuve. En revanche, la seconde sépulture, dotée d'un sarcophage en pierre, pourrait être liée au décès d'un jeune voyageur qui passait avec sa famille sur la via Domitia ".
Quoi qu'il en soit, de par la richesse du mobilier funéraire qu'elles contenaient, ces sépultures ont marqué les archéologues vauclusiens qui se sont penchés surelles. " Du premier coffre ont été dégagés des restes osseux brûlés appartenant à deux défunts adultes, l'un plutôt âgé et l'autre plutôt jeune ".Pour les archéologues du service, cette double sépulture est assez rare sans toutefois être un cas unique dans l'arc méditerranéen. Ce qui rend cette tombe exceptionnelle, c'est surtout la richesse du mobilier raffiné qu'elle contenait. " Nous avons extrait de ce coffre à incinération une incroyable quantité d'objets appartenant à une dotation funéraire peu commune : des céramiques et de nombreux objets en verre, matériaux particulièrement précieux à l'époque, comme des balsamaires, des cruches, des coupelles, des burettes pour remplir les lampes à huile ", énumère l'archéologue qui insiste sur le fait que chaque item, une trentaine en tout, était doublé. " Un pour chacun des défunts " et que leur qualité est à elle seule révélatrice de leur fortune respective.
La douleur de ceux qui restent
La seconde sépulture est pour sa part encore plus richement dotée. En plus des céramiques et des arte facts de verre, le coffre en pierre mis au jour par les archéologues du Vaucluse contient un ensemble remarquable de six petites amulettes en ambre prenant la forme de lapin stylisé, d'un singe, de sexe féminin et masculin ou de figures géométriques entrelacées. À ces bijoux, sans doute importés de la Baltique, " s'ajoutent aussi un gobelet en argent et même une bague en or ", continue l'archéologue, qui ne peut qu'insister sur la richesse exceptionnelle de la découverte. " C'est la sépulture d'un tout jeune enfant (un nourrisson d'environ sept mois). En plus de ces objets précieux, nous avons aussi découvert ce qui s'apparente à des jouets en bois et en fer, des épées et un poignard miniatures .Les fourreaux étaient conçus avec un assemblage de cuir gravé et les pommeaux du poignard et du glaive sont fabriqués avec de l'ivoire tournée, c'est dire la richesse de la dotation funéraire ", s'enthousiasme Patrick De Michèle. " Si l'on ajoute à cela deux éléments de tabletterie décorative en os représentant un citoyen vêtu d'une toge et un légionnaire romain, vraisemblablement un archer, tout semble indiquer que nous sommes bel et bien en présence d'un jeune garçon destiné à devenir quelqu'un d'important dont le père devait avoir de haute fonction militaire au sein de l'Empire ".
Si le bébé était encore trop petit pour profiter de ces jouets et pour être incinéré (car cette pratique était réservée aux plus âgés), un soin tout particulier a été apporté à son inhumation puisque parmi les trouvailles des archéologues se trouvent aussi trois pièces percées d'un trou central et respectivement frappées de trois visages féminins différents. " Spes, Paxet Fortuna, trois personnifications liées aux rites funéraires aptes à accompagner le défunt vers la nouvelle vie d'espoir, de paix et de bonheur ". Mais attention ! Ces trois monnaies n'ont rien à voir avec l'offrande à Charon et hormis leur valeur symbolique, elles n'avaient sans doute plus cours lors de l'inhumation .Reliées entre elles par une tige métallique, elles formaient une " crepitacula ", sorte de hochet manipulé par les mains des adultes pour attirer l'attention du nouveau-né mais aussi éloigner les mauvais esprits. " C'est un élément très touchant qui nous plonge dans la situation des parents qui viennent de perdre leur tout petit bébé ".
Un sentiment transmis par quelques objets et qui, vingt siècles plus tard, n'a pas évolué.