culture
Dialogue entre le Luberon et les hommes
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Ces paysages ont vu les siècles défiler et ont marqué le cœur des hommes qui l’ont habité ou traversé. Yann Codou vit à Auribeau, au pied du Mourre Nègre, le sommet du Luberon (1 125 mètres). Universitaire et professeur spécialisé en archéologie médiévale, il a toujours entretenu une relation particulière avec cette montagne et le pays d’Apt. Il a écrit de nombreux ouvrages sur les cathédrales, églises et monastères du Moyen Âge. Désormais en semi-retraite, il s’est livré à un exercice bien différent : écrire un livre sur le Luberon. Il ne s’agit nullement d’une compilation sur la faune et la flore de ce bout de Provence, mais d’une exploration de plusieurs années de cette montagne et « comment elle a construit le caractère des hommes ».
Au fil des pages, on ressent la méthode et la rigueur de l’universitaire émérite, mais aussi la plume nostalgique d’un enfant du pays qui a connu deux Luberon. Celui des années 1950-1960 où certains villages étaient abandonnés et la vie plutôt rude, et l’actuel très médiatique et prisé, dont les calades et panoramas emplissent les cartes postales. Yann Codou espère que son livre fait le lien avec les nouveaux arrivants tout en gardant vivante la mémoire des lieux.
Une génération disparue
L’ouvrage est enrichi de nombreuses citations piochées çà et là dans les livres de Bosco et autres auteurs qui ont écrit sur le Luberon avant lui. Parfois de manière juste, parfois sur un ton plus caricatural. « J’ai eu beaucoup de plaisir à les relire », assure Yann Codou. Ses mots se mêlent à ceux de ses prédécesseurs pour brosser le portrait d’une montagne presque mystique, dotée d’une âme, à la fois animale, caractérielle et qui n’a pas fini de se raconter.
Dans son livre, le passé des villages perchés s’entrelace avec celui des villes comme Apt, Pertuis ou Cavaillon. « Plusieurs générations ont disparu et il y avait de sacrés personnages dans la montagne et le coin. J’avais envie de parler d’eux », atteste l’auteur. Les chapitres, classés par ordre alphabétique, s’attardent aussi sur les écrivains, peintres, photographes, élus qui ont façonné cette terre vauclusienne. Yann Codou consacre également plusieurs paragraphes aux folklores et galéjades indissociables de ce territoire et de sa manière de vivre, et s’arrête sur la symbolique de la maison ou l’importance de la lavande.
Des anecdotes amusantes
On trouve quelques anecdotes surprenantes sur la piscine de Saint-Saturnin-lès-Apt creusée avant les années 60, ou les Marseillais en quête d’un cabanon à prix modique dans un village dépeuplé. Il relate aussi des souvenirs d’enfance, notamment la fois où il avait été contraint de vivre l’ouverture de la chasse pieds nus. En pleine croissance, les pieds grandissent et ne rentrent plus dans les souliers de l’année d’avant. « Il y avait également un chasseur qui passait dans le village avec sa 2CV en brandissant un lièvre. Une fois, deux fois, trois fois. Il agaçait tout le monde et certains se disaient qu’il décimait la forêt. On a su après qu’il n’en tuait pas à chaque fois mais qu’il passait avec le même lièvre qu’il avait empaillé », se remémore Yann Codou, en riant. A coup sûr, vous laisserez échapper quelques sourires en parcourant ces pages.
« Luberon. Les hommes et les choses », de Yann Codou, Les Presses du Midi. 22€, 292 pages.